C'est la rentrée 76

 L'école c'est chouette

Sur mon cartable

Perdu

Dans la ville

Je pleure

Les lacets dans la flaque

Que c'est loin

Bastia

Ici tout est gris

C'est moche

Triste

J'arriverai en retard pour sûr

L'école c'est chouette

Sur mon cartable

Je trace

À Levallois

C'est la rentrée 76

Concomitance

 Le jeune Shah

Sur les remparts

Langoureusement

Ce matin

A l'aube

A récité un poème.

Et il s'attarde sur chaque mot

Tout en contemplant un convoi funèbre

Au bas du Palais

Et il se dit admiratif;

Au fait qu'est-il devenu

Ce Poète de l'Amour

Du rossignol et de la nuit

Exilé par mon père?

Récompensons le

De diamants et d'or

Couvrons le de bijoux, de rubis et d'agates

Pour son art

Allez le chercher

Dans tout le royaume et l'univers et le monde

Je veux l'honorer

Je le mande ici

Dans mon palais.

Et les messagers de s'élancer dans des contrées lointaines et exotiques

Pendant ce temps

A quarante mètres du palais

Un convoi misérable s'élance

Plus que quelques amis encore

Aussi désargentés que lui

Et la famille désolée

Se lamentant

Que son métier ne l'a jamais nourri

Ni enrichi

Ni rendu célèbre

Il est mort cette nuit

Que des pleurs et des larmes

A quarante mètres du palais

Un convoi poussiéreux s'ébranle

Dans le silence

Que rompt

Au gré du vent

Au loin

Le murmure d'un poème récité

Avec l'aube qui se lève

Sur la ville et le palais

Et les remparts argentés

Et un jeune homme qui se confond

Avec le soleil

Concomitance.

Le ravi.

 Devant la crèche empaillée

Lève les deux bras

Le ravi

Poussiéreux

Jamais avare

Jamais lassé

Jamais fatigué

Vers les étoiles acides      

Et la lune mytilène 

Et les nuages roses...

 Dans la crèche empaillée

Repose 

L'Enfant

Entre l'âne récalcitrant et la vache docile

Le chétif Dieu

Incarné

Rit

La lumière améthyste emplit tout

De Benjamin renait l'espoir

La joie pourpre emplit tout

De Benjamin renait  le Roi

Il sourit

 Devant la crèche empaillée

Lève les deux bras

Le ravi

Radieux

La terre ocre répond au ciel  mauve

Et la chaleur caniculaire explose

Dans la nuit glaciale

Et les cieux violets s'embrasent 

Et

Se remplissent d'anges dodus et poupons

Et de musiques merveilleuses...

Devant la crèche empaillée

Lève les deux bras

Le ravi

Muet

Il ne parle pas, il ne théorise pas

Il médite

Il se tait 

Il vit

Le miracle.

Toujours

Devant la crèche

Les deux bras levés vers le ciel

Orangé

De l'aube.

Entre les bergers, les Rois mages

Les moutons et le puisatiers

Il lève les deux bras

Toujours ravi

Le ravi

Toujours neuf

Le Poète

Dans la crèche.

A l'aube du Printemps

 Je pleure

De joie

Le lilas du printemps

Si doux

Je pleure

De joie

Le soleil du printemps

Si doux

Je pleure

De tristesse

La Lune en Bélier

Me rend mélancolique

Soudain

En songeant

Aux enfants pendus

De onze ans

A Vitry ou d' ailleurs

Pendus mêmement

A l'aube du Printemps

Danse Macabre

Danse

Et ris

La lune luit

Chante le chat-huant

Danse

Et pleure

Contemple

Sous les étoiles

L'or

Et l'argent

Et le plomb

Chante le chat-huant

Danse

Et respire

L'encens

Ce soir

Derrière toi

Elle danse

Devant toi

La Mort

Chante le chat-huant

Danse

Macabre

                        

Je pleure le soleil mort de novembre

Je pleure le soleil mort de novembre

 

Les tapis dorés sous les abricotiers

Je pleure le soleil mort de novembre

Les  ocres ogres nébuleux 

Je pleure le soleil mort de novembre

les  champignonnées de rosés 

                                           Je pleure le soleil mort de novembre

                La morbide lune du Scorpion

     Je pleure le soleil mort de novembre

Le bleu funèbre lac Cadeuil

             

                                                             Je pleure le soleil mort de novembre

Si loin

 Si près 

                                                           Je pleure le soleil mort de novembre

Les forêts de bouleaux

Aux troncs argentés

Où meurent

Innocents

Sous leurs branches désarmées

Des enfants

Assoiffés et affamés

Pourchassés par la soldatesque

Des enfants

Des petits enfants roses

Condamnés par les Tyrans

Recouverts bientôt par la neige

Morts

                                                                                    Si près

Si loin

 

Je pleure le soleil mort de novembre

 

Sans Mon père

 Ce soir là

Il voulait partir

A Cadeuil

Y mourir certainement

Dans sa dernière fugue

Il voulait s'élancer

Vers Vénus

Partir dans les étoiles

Clac

Il a fermé la porte...

Hélas

Il est tombé

L'escalier est plein de son sang

Rouge

Maintenant

L'aube est triste

Sans

Mon père